Le Compostage consiste à mélanger des sols excavés avec des amendements organiques (dénommés compost) et à les disposer en tas trapézoïdaux (andains) régulièrement espacés afin de favoriser la biodégradation.
Il existe différentes sortes de matière organique naturelle (compost) pouvant être ajoutées aux sols pollués :
- les matières organiques animales : déjection de porcs, chevaux, vaches (enrichies si nécessaires),
- les matières organiques végétales : légumes, fruits, copeaux de bois, herbes, foin, paille.
Le compost agit sur la biostimulation (apport de nutriments, de carbone, d’azote ….), la bioaugmentation (apport de bactéries) et l’aération (apport d’agents structurants et d’éléments rigides augmentant la porosité).
Le choix des différents amendements dépend du type de sols et de pollution. Des tests de traitabilité sont toujours nécessaires pour optimiser le choix des amendements : état de maturité, type de biodégradabilité du compost (lente ou rapide), apport structurant, température souhaitée.
Les sols doivent être préparés avant leur mélange avec le compost (élimination des fractions grossières non biodégradables et émottage). Le ratio compost/sols pollués peut varier entre 0,2 et 0,7. Le mélange est par la suite stocké sous forme d’andains de forme trapézoïdale étudiée afin de conserver la chaleur en son sein.
Figure 1 - Schéma de principe du compostage.
Tout comme pour le Biotertre, il existe des conditions optimales de biodégradation :
- le ratio C/N/P optimal est compris entre 100:5:1 et 300:5:1 ; des ajustements par amendement sont souvent réalisés ;
- le taux d’humidité optimal est compris entre 50 et 80% ; si le taux d’humidité est trop élevé du fait des eaux pluviales, il conviendra de recouvrir les andains par un film imperméable à l’eau mais perméable à l’air (ex. Gortex, polypropylène) ou de créer des pentes plus abruptes ; si le taux d’humidité est trop faible, il conviendra alors d’arroser le tas ;
- les températures optimales pour la dégradation des principaux polluants sont situées entre 25 et 45°C (microorganismes mésophiles). Dans certains cas, des températures plus importantes sont nécessaires (45 à 60°C) ; certains microorganismes thermophiles évoluant à cette température sont alors recherchés (dégradation du TNT). L’atteinte de la température désirée résulte du contrôle de la dégradation biologique exothermique, celle-ci dépend du choix du compost (plus ou moins biodégradable), de la forme de l’andain et de l’emploi de certains géotextiles adsorbant la lumière ;
- la concentration en oxygène minimale est de l’ordre de 5 %. D’une manière générale, l’aération engendrée par l’apport des agents structurants, le retournement des andains et les mouvements convectifs de l’air sont suffisants pour obtenir les conditions optimales ; si nécessaire, une aération similaire à celle des biotertres est mise en place. Dans certains rares cas, notamment lors de la dégradation de certains solvants chlorés, il est nécessaire d’avoir à certains endroits de l’andain des conditions anaérobies (avec présence d’eau) pour la dégradation de certains solvants chlorés.
- le pH doit être compris entre 6 et 8.
Les tas ne sont, d’une manière générale, pas d’une hauteur supérieure à 3 m (afin d’éviter le compactage). La forme et la taille maximale des andains sont dirigées par la nécessité des apports en oxygène (largeur 3-4 m). L’aération et l’homogénéisation de la biodégradation sont améliorées par un retournement régulier des andains (une fois par semaine).
Le Compostage est mis en œuvre à partir des éléments suivants :
- une plateforme de prétraitement (homogénéisation, criblage, matériel relatif à l’ajout de nutriments, amendement de matière organique ou structurante …),
- une plateforme de traitement fixe ou mobile sur des alvéoles imperméabilisées (béton ou PEHD-polyéthylène haute densité) et inclinées permettant la récupération des lixiviats,
- un réseau de récupération et de recirculation des lixiviats et matériel relatif à l’ajustement de l’humidité (drain, sprinkler (diffuseurs), pompes …),
- si nécessaire une membrane perméable à l’air et imperméable à l’eau (Gortex, polypropylène),
- un retourneur d’andains (aérateur mécanique de type agricole),
- du matériel de contrôle des conditions du milieu : oxygénation du milieu, humidité, concentration des nutriments, température, densité de la population microbienne en place,
- un stockage des déchets solides et liquides issus du traitement.
Les paramètres à suivre lors d’une opération de Compostage sont les suivants :
- les paramètres relatifs au bon développement des bactéries :
- le pH, la température, la conductivité, le potentiel redox,
- l’humidité,
- le ratio C/N/P/K, les teneurs en éventuels additifs et en compost,
- si nécessaire le dénombrement bactérien dans les sols et dans l’eau,
- les concentrations en polluants dans les sols et les gaz des sols (suivi de la production de CO2 notamment),
- si nécessaire, les concentrations en polluants dans les rejets liquides (lixiviats), les paramètres relatifs au traitement des eaux (débits, saturation des filtres….), les concentrations en polluants dans les rejets gazeux.
Les variantes résident dans le type et le mode d’ajout d’agents structurants et de compost. La nécessité de la présence d’un toit, d’une aspiration et d’un traitement de l’air dépend de la quantité de composés volatils présents.
Le Compostage est efficace pour traiter les sols souillés par les composés monoaromatiques (BTEX), phénols, HAP (les plus légers de type naphtalène et phénanthrène), hydrocarbures pétroliers (essence, diesel, lubrifiant, huiles), herbicides/pesticides (par exemple, l’atrazine) mais aussi PCB, PCP, chlorobenzène et certains explosifs (trinitrotoluène…).
1. Faisabilité
La faisabilité d’un traitement est évaluée à l’aide d'essais :
- d’orientation qui visent à valider la possibilité de mettre en œuvre une technique de dépollution ;
- d’évaluation des performances qui servent à vérifier l’atteinte des objectifs et permettent d'estimer la vitesse du traitement donc sa durée.
Le guide méthodologique « Traitabilité des sols pollués » de l’ADEME (2009) et le Guide ESTRAPOL vous donneront des éléments vous permettant de vérifier la faisabilité de la technique sur votre site.
2. Dimensionnement
Le dimensionnement relève d’un travail d’ingénierie en aval des essais de faisabilité.
Les données nécessaires au dimensionnement sont essentiellement recueillies lors des tests de biodégradabilité et de compatibilité au compost (oxygénation du milieu, humidité, concentration des nutriments, température, densité de la population microbienne en place, type de compost, cinétique de réaction).
Ces tests, associés à la prise en compte des paramètres intrinsèques du milieu (perméabilité à l’eau, perméabilité à l’air, vitesse de percolation...) vont permettre de définir les conditions d’opération optimales et le dimensionnement de l’unité de traitement :
- la géométrie des andains en fonction des données de terrain (H/L/l),
- le type de compost et ratio d’apport nécessaire,
- le type et ratio d’agents structurants nécessaires,
- la fréquence des retournements,
- si nécessaire, les caractéristiques du réseau de ventilation (taux d'oxygénation) :
- le nombre, l’espacement et les caractéristiques des drains d’extraction,
- le type et la puissance de l’extracteur,
- si nécessaire les caractéristiques du réseau d’aspersion (ajout de nutriments et recirculation des lixiviats) :
- le nombre, l’espacement et les caractéristiques des drains de récupération et de recirculation (aspersion) des lixiviats,
- le type et la puissance de la pompe de recirculation et des éléments associés (cuve de stockage, système de mélange),
- le type de nutriments,
- éventuellement les dimensions des unités de traitement (rejets liquides).
L’Union des Professionnels de la Dépollution des Sites (UPDS) a déterminé les paramètres à fournir pour permettre le dimensionnement des traitements :
a. Définition du projet
- Délais,
- Objectifs de traitement (sols et/ou eaux et/ou gaz du sol),
- Seuils de dépollution ou profondeur/volume d'excavation,
- Seuils de rejet à l'air,
- Volume à traiter,
- Devenir des terres après traitement.
b. Sol ou matériau à traiter
- Géologie /lithologie ou nature des sols.
c. Polluants
- Type (nature),
- Concentrations (cartographies de pollution dans les sols, l'eau, les gaz du sol),
- Présence de produit pur (flottant, coulant, piégé…),
- Estimation du stock.
d. Essais de traitabilité
Le document suivant issu du guide sur la « Traitabilité des sols pollués » de l’ADEME (2009) vous donnera des éléments vous permettant de vérifier la faisabilité de la technique sur votre site.
Cahier des charges :
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Le traitement par Compostage présente les avantages suivants :
- technique éprouvée ayant démontré une grande fiabilité et des résultats extrêmement significatifs,
- procédé destructif des molécules de polluants,
- technique fortement utilisée pour les sols hétérogènes et facilement biodégradables,
- technique permettant d’accélérer les traitements biologiques ex-situ classiques,
- technique permettant un meilleur contrôle que les traitements biologiques in situ (et donc de meilleurs rendements épuratoires),
- faible maintenance,
- compétitivité en termes de coût et de performance,
- applicabilité à de nombreux polluants,
- possibilité de traiter des contaminants relativement récalcitrants dans d’autres conditions,
- la surface au sol est moins importante que celle nécessaire au Landfarming,
- amélioration des qualités physiques des sols (taux de matière organique notamment).
Ses inconvénients et ses facteurs limitants sont les suivants :
- technique nécessitant l’Excavation des sols,
- technique nécessitant un prétraitement conséquent,
- technique de biodégradation plus lente et moins performante que le Biotertre,
- le Compostage « classique » doit être de préférence utilisé pour des polluants facilement biodégradables et peu volatils (ex. : gasoil) pour éviter les risques de contamination de l'air par évaporation,
- le devenir des sols excavés doit être examiné avec attention,
- le fait de rajouter parfois des agents structurants augmente le volume de sols,
- le procédé nécessite une surface au sol parfois conséquente,
- le pourcentage de particules fines contenues dans le sol est un facteur limitant,
- les sols contenant de l’argile et un taux de matière organique élevé engendrent une grande adsorption des polluants sur la matrice solide, ce qui diminue les rendements épuratoires,
- le système nécessite souvent un tri au préalable ; les granulométries supérieures à 60 mm sont souvent exclues du procédé,
- la nature du contaminant (biodégradable) et les teneurs en polluants doivent être considérées avec attention,
- les compostages statiques (sans retournement) peuvent aboutir à des résultats moins homogènes que ceux obtenus avec retournement ou mélange,
- le taux d’humidité, le ratio carbone/azote/phosphate/potassium, la température, l’aération doivent être maintenus aux conditions optimales,
- l’injection d’oxygène peut provoquer le colmatage d’une partie des pores des sols,
- les concentrations élevées en polluants peuvent être toxiques pour les microorganismes (HCT > 50 à 100 g/kg),
- les concentrations élevées en métaux/métalloïdes sont incompatibles avec ce procédé,
- des températures faibles diminuent considérablement l’efficacité du traitement,
- les émissions atmosphériques nécessitent parfois un traitement d’air (surcoût).
Les coûts varient entre 15 et 40 €/t de sols traités. (BRGM, 2010)
Cette technique est couramment employée sur les sites présentant des hydrocarbures volatils à semi-volatils biodégradables.
Le rendement de ce procédé varie fortement en fonction des conditions du milieu ; il peut dans certains cas atteindre plus de 95%.
La cinétique de biodégradation est le facteur limitant le plus contraignant.
Les temps de traitement nécessaires varient de 2 à 12 mois.
Aucun acteur n’a déclaré avoir utilisé le Compostage en 2010.
En 2012, le traitement biologique a été la deuxième famille de traitement la plus utilisée (avec plus de 37% des tonnages de terres totaux), derrière les traitements physico-chimiques (plus de 55% des tonnages totaux de terres). Il est toutefois important de noter que les traitements physico-chimiques sont principalement liés à des chantiers de Venting/Bioventing (technique la plus utilisée pour traiter les sols, avec près de 35% des tonnages totaux à elle seule), chantiers généralement pluri-annuels ce qui peut entraîner une surestimation des volumes de sols réellement traités par Venting/Bioventing sur l'année 2012. Après le Venting/Bioventing et à part les évacuations en Installation de Stockage de Déchets Inertes (environ 10% des tonnages totaux), les 3 techniques les plus utilisées sont des techniques de traitement biologiques (Installation de traitement biologique hors-site (biocentre), bio-augmentation/bio-stimulation in situ, biodégradation sur site (Biotertre)), avec respectivement 11%, 9% et 7% des tonnages de terres traitées. Les traitements biologiques sont des techniques éprouvées et maîtrisées par une grande partie des acteurs de la dépollution. Ces traitements sont efficaces sur un grand nombre de polluants organiques et en particulier les hydrocarbures et les solvants halogénés et ont l’avantage d’être peu coûteux.
(ADEME, 2012) (ADEME, 2015)
1. Biblioghraphie
ADEME (2009)
Traitabilité des sols pollués - Guide méthodologique pour la sélection des techniques et l'évaluation de leurs performances. Guide méthodologique. Version 0 - 15 octobre 2009, 123 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/5686-traitabilite-des-sols-pollues.html
ADEME (2012)
Les taux d'utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (Les)
Étude Ernst & Young
Synthèses des données 2008 – 114 p.
ADEME (2015)
Taux d'utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (Les)
Étude Ernst & Young
Synthèse des données 2012, 148 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/1738-taux-d-utilisation-et-couts-des-differentes-techniques-et-filieres-de-traitement-des-sols-et-des-eaux-souterraines-pollues-en-france-les.html
BRGM (Juin 2010)
Quelles techniques pour quels traitements - Analyse coûts-bénéfices
S. Colombano, A. Saada, V. Guerin, P. Bataillard, G. Bellenfant, S. Beranger, D. Hube, C. Blanc, C. Zornig et I. Girardeau
Rapport final BRGM/RP-58609-FR
http://ssp-infoterre.brgm.fr/quelles-techniques-quels-traitements
http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-58609-FR.pdf
ESTRAPOL (2019)
Essais de faisabilité de traitement de sols pollués
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/3966-projet-estrapol.html
2. Liens
Technology guide: bioremediation
2018.
CRC for Contamination Assessment and Remediation of the Environment - Care National Remediation Framework. Version 0.1, 44 pages
https://crccare.com/wp-content/uploads/2022/09/CTechguide_Bioremediation_Rev0.pdf