La Pyrolyse consiste à chauffer les sols en l’absence d’oxygène pour en extraire les polluants volatils et semi-volatils.
La Pyrolyse consiste à introduire les terres excavées dans un four afin de les chauffer en l’absence d’oxygène à des températures comprises entre 150 et 540°C. Dans les faits, il est impossible d’obtenir une concentration en oxygène proche de 0%, les techniques actuelles permettent néanmoins de travailler avec des concentrations en oxygène inférieures aux conditions stœchiométriques. La méthode de traitement est donc très proche de celle utilisée pour l’Incinération, la différence réside dans le fait que les conditions d’opération sont réalisées à des températures plus basses et en présence de peu d’oxygène.
Le but est de désorber les contaminants adsorbés sur la matrice sol et d’augmenter la tension de vapeur des composés peu volatils afin de les volatiliser et de les transférer dans la phase gazeuse.
Préalablement à la Pyrolyse, les sols sont traités par tamisage, séchage… ; seules les particules de quelques centimètres sont acceptées dans le four.
Figure 1 - Schéma de principe de la pyrolyse.
Les sols pollués sont ainsi transformés en gaz et en un résidu solide. La Pyrolyse provoque le « cracking » des polluants organiques en composés plus simples. Les gaz sont constitués de monoxyde de carbone, d’hydrogène, de méthane et d’hydrocarbures divers. La faible présence d'oxygène lors de la pyrolyse permet d'éviter la formation de sous-produits toxiques (par exemple, les dioxines). Les gaz sont récupérés en vue d’un traitement : élimination des particules (filtres, scrubbers) puis élimination des composés organiques et du monoxyde de carbone (brûleur, oxydation catalytique, seconde chambre de combustion, condenseur ou charbon actif).
Un résidu solide formé de cendres et de carbone (coke) ainsi que de verres et de métaux est récupéré. Il est soit valorisé par production d'électricité et de chaleur (thermolyse intégrée), soit lavé, soit éliminé en centre de stockage des déchets.
La Pyrolyse est mise en œuvre à partir :
- d'unités de prétraitement :
- unité de broyage ou de ségrégation,
- unité de séchage,
- unité d’émottage,
- unité de mélange (avec des additifs de type chaux, gypse …),
- unité d’homogénéisation,
- d'un four de pyrolyse (unités rotatives : rotary kiln),
- de matériel relatif à la création de flux et à l’ajustement des paramètres thermiques,
- d'unités de traitement des gaz :
- chambre de post combustion, brûleur, oxydation catalytique,
- échangeur thermique,
- dépoussiéreurs à filtres, dépoussiéreurs humides ou dépoussiéreurs électrostatiques,
- condenseur, laveurs, adsorption sur charbon actif,
- d'une unité spécifique pour la récupération des métaux si nécessaire (condensation …),
- d'une unité de récupération d’énergie (dans le cas de la pyrolyse intégrée),
- stockage des déchets solides et liquides issus du traitement.
Les paramètres à suivre lors d’une opération de Pyrolyse sont les suivants :
- les concentrations en polluants dans les sols, les teneurs en matière organique, la granulométrie,
- la température, la turbulence, le temps de séjour,
- la dépression au niveau du four et flux aérauliques associés,
- les concentrations en polluants dans les rejets atmosphériques (respect des normes de rejets),
- les paramètres relatifs au traitement des gaz (débits, dépression, perte de charge, saturation du charbon actif….),
- les teneurs en polluants en fin de traitement,
- les teneurs en polluants dans les lixiviats en fin de traitement.
Il existe différents types de fours, les principaux sont les suivants :
- les fours rotatifs (Rotary Kiln) : les fours sont cylindriques, creux et légèrement inclinés ; leur rotation permet de mélanger les sols et de les faire avancer à travers le four ;
- les fours à lit fluidisé (Fluidized Bed Furnace) : un cylindre vertical fermé contient dans sa partie basale un lit inerte chaud (silice) maintenu en suspension par un courant d’air ascendant ; les sols sont introduits au sein de ce lit et sont brassés.
- la pyrolyse en bain de sels fondus (Molten Salt Destruction) : il s’agit d’un procédé permettant de conduire à des réactions de dépolymérisation et de dégradation, il permet aussi d’obtenir des produits pétrochimiques de valeur ajoutée intéressante à partir de résidus organiques. Le bain de sels utilisé pour la réaction peut être un mélange eutectique à bas point de fusion et la composition peut être choisie pour jouer un rôle de catalyseur de réaction et améliorer le rendement énergétique. Le bain de traitement neutralise les polluants, tels que les gaz contenant du chlore ou du soufre qui se forment au cours de la réaction. Il agit aussi comme dissipateur de chaleur et comme absorbant pour les impuretés et résidus (coke, sels complexes, etc.).
Le traitement des rejets atmosphériques est très variable ; l’enchaînement des différentes unités de dépoussiérage, d’oxydation ou d’adsorption, de neutralisation est très variable.
La Pyrolyse est particulièrement adaptée pour traiter les sols riches en matière organique contaminés par des composés semi-volatils ou peu volatils : fractions lourdes d’hydrocarbures, huiles, pesticides, PCB, dioxines, furannes, HAP, résidus de raffinerie, produits de traitement du bois (pentachlorophénols), certains métaux lourds (mercure), mais aussi des sols pollués par des hydrocarbures plus légers mais fortement adsorbés sur certains types de sols (taux de matière organique très élevés) : essences, gasoils, kérosènes, solvants chlorés.
Le temps de séjour, la turbulence et la température sont adaptés en fonction des concentrations initiales en polluants (et du Pouvoir Calorifique Inférieur) et des propriétés des sols (teneurs en matière organique, teneur en eau).
1. Faisabilité
La faisabilité d’un traitement est évaluée à l’aide d'essais :
- d’orientation qui visent à valider la possibilité de mettre en œuvre une technique de dépollution ;
- d’évaluation des performances qui servent à vérifier l’atteinte des objectifs et permettent d'estimer la vitesse du traitement donc sa durée.
Le guide méthodologique « Traitabilité des sols pollués » de l’ADEME (2009) vous donnera des éléments vous permettant de vérifier la faisabilité de la technique sur votre site.
2. Dimensionnement
Le dimensionnement relève d’un travail d’ingénierie en aval des essais de faisabilité.
Les données nécessaires au dimensionnement sont les suivantes :
- le temps de séjour, la température et la turbulence dans l’unité de traitement ; ces paramètres dépendant :
- des concentrations finales à obtenir,
- de l’efficacité du transfert thermique du four,
- les données nécessaires au prétraitement (broyage, préséchage, émottage, mélange de la chaux, du gypse …),
- les données nécessaires au traitement des rejets atmosphériques (taux de poussières, teneurs en composés volatils, teneurs résiduelles à obtenir en rejet).
L’Union des Professionnels de la Dépollution des Sites (UPDS) a déterminé les paramètres à fournir pour permettre le dimensionnement des traitements :
a. Définition du projet
- Délais
- Objectifs de traitement (sols et/ou eaux et/ou gaz du sol),
- Seuils de dépollution ou profondeur/ volume d'excavation
b. Sol ou matériau à traiter
- Géologie /lithologie ou nature des sols,
- Taux de matière organique,
- Granulométrie,
- Humidité.
c. Polluants
- Type (nature),
- Concentrations (cartographies de pollution dans les sols, l'eau, les gaz du sol),
- Présence de produit pur (flottant, coulant, piégé…),
- Estimation du stock,
- Températures de fusion,
- Tensions de vapeur,
- PCI associés.
d. Essais de traitabilité
Le document suivant issu du guide sur la « Traitabilité des sols pollués » de l’ADEME (2009) vous donnera des éléments vous permettant de vérifier la faisabilité de la technique sur votre site.
La Pyrolyse présente les avantages suivants :
- technique éprouvée ayant démontré une grande fiabilité et des résultats extrêmement significatifs,
- technique permettant de traiter de nombreux polluants notamment les composés semi-volatils et peu volatils,
- technique permettant de traiter les sols fortement pollués,
- technique efficace même pour des sols argileux et hétérogènes,
- technique permettant d’atteindre des taux de dépollution très importants,
- technique rapide,
- technique moins onéreuse que l’Incinération et la Vitrification,
- volume de gaz à traiter faible par rapport à l'incinération,
- cette technique permet de traiter tous les types de déchets et est particulièrement adaptée pour le traitement des sols riches en matière organique,
- revalorisation énergétique possible des sous-produits solides.
Ses inconvénients et ses facteurs limitants sont le suivants :
- la technique de désorption ne permet pas de détruire les polluants,
- le procédé nécessite l’excavation des sols,
- le procédé utilisé en traitement hors site nécessite un transport coûteux,
- les rejets atmosphériques doivent faire l’objet d’un traitement poussé et coûteux,
- les gaz doivent la plupart du temps être refroidis afin de protéger les unités de traitements en aval,
- les débouchés des sous-produits doivent être considérés dès le départ du projet car ils peuvent poser des problèmes non négligeables,
- l’hétérogénéité des sols peut impacter notablement les rendements épuratoires,
- les sols présentant un taux d’humidité supérieur à 20 % doivent faire l’objet d’un prétraitement par chauffage,
- les températures réellement atteintes au cœur de la pollution influent sur le rendement opératoire,
- les composés organiques peu volatils peuvent être volatilisés et donc extraits du sol en phase gazeuse à condition que leur tension de vapeur ait augmenté de manière significative ; en règle générale et pour un sol donné, moins le composé est volatil et plus la température requise est élevée,
- les coûts de production de température (coûts d’exploitation) sont souvent importants et sont souvent un frein à l’application de ce procédé,
- les composés peu volatils nécessitent des températures élevées et donc des coûts de fonctionnement plus élevés,
- les particules d’une taille supérieure à 5 cm ne sont pas admises : il faudra soit procéder à une ségrégation soit à un broyage,
- les sols compacts doivent faire l’objet d’un émottage, d’un mélange avec de la chaux, du gypse ou des sols plus friables,
- les sols à forte teneur en argile seront plus difficiles à chauffer,
- les teneurs élevées en métaux génèrent des problèmes de rejets atmosphériques ; ils peuvent aussi, le cas échéant, nécessiter une stabilisation des résidus solides,
- le procédé demande un haut niveau de technicité et des installations de traitement très lourdes.
Les coûts de traitement varient de 75 à 150 €/t de sols traités (selon le type de traitement : pyrolyse à thermolyse intégrée). (BRGM, 2010)
Il existe quelques unités de traitement de déchets par thermolyse en France.
Dans de bonnes conditions, des rendements épuratoires supérieurs à 90% ont été obtenus.
Ces rendements dépendent des conditions d’exploitation, des concentrations en polluants et des propriétés des sols (hétérogénéité du milieu, présence de matière organique et présence de polluants très peu volatils). Par exemple, les rendements sont inversement proportionnels au taux d’humidité des sols. On peut noter que des concentrations finales en BTEX et hydrocarbures totaux inférieures à 10 ppm voire 100 ppb ont été obtenues par Pyrolyse.
Certaines unités de traitement sont capables de traiter de 20 à 30 tonnes de sol par heure.
Aucun acteur n’a déclaré avoir utilisé la Pyrolyse au cours de l'enquête conduite en 2010.
En 2012, les traitements de nature thermique ont été relativement peu utilisés avec un taux d'un peu plus de 5 % : ces traitements sont en général le dernier recours pour des polluants peu volatils difficilement traitables par les autres techniques. Ce sont des traitements rapides lorsqu’ils sont réalisés sur site ou hors site mais très coûteux. Ils ont par ailleurs un impact non négligeable sur la qualité des sols après traitement.
(ADEME, 2012) (ADEME, 2015)
1. Bibliographie
ADEME (2009)
Traitabilité des sols pollués - Guide méthodologique pour la sélection des techniques et l'évaluation de leurs performances. Guide méthodologique. Version 0 - 15 octobre 2009, 123 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/5686-traitabilite-des-sols-pollues.html
ADEME (2012)
Les taux d'utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (Les)
Étude Ernst & Young
Synthèses des données 2008 – 114 p.
ADEME (2015)
Taux d'utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (Les)
Étude Ernst & Young
Synthèse des données 2012, 148 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/1738-taux-d-utilisation-et-couts-des-differentes-techniques-et-filieres-de-traitement-des-sols-et-des-eaux-souterraines-pollues-en-france-les.html
BRGM (Juin 2010)
Quelles techniques pour quels traitements - Analyse coûts-bénéfices
S. Colombano, A. Saada, V. Guerin, P. Bataillard, G. Bellenfant, S. Beranger, D. Hube, C. Blanc, C. Zornig et I. Girardeau
Rapport final BRGM/RP-58609-FR
http://ssp-infoterre.brgm.fr/quelles-techniques-quels-traitements
http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-58609-FR.pdf